RéflexionsVétérinaire

Coup de gueule contre le coup de gueule… sur l’euthanasie!

By 28 janvier 2020 No Comments

J’avais déjà vu circuler cet article il y a quelques temps :

Euthanasie : un vétérinaire au cœur brisé raconte ce que fait un animal avant de mourir

Et il m’avait déjà choquée. Mais sur le coup je n’avais pas voulu réagir…

Alors maintenant qu’il resurgit, sous une autre forme mais avec un fond conservé, j’ai décidé de partager mon avis…

Émotion quand tu nous tiens…

Tout d’abord, je n’aime pas ces articles qui font uniquement dans la sensiblerie… On trouve un sujet qui touche à l’émotion, et hop, c’est le buzz ! Et quel sujet plus sensible que celui de l’euthanasie de nos animaux domestiques ?

Tous les propriétaires ont déjà été traumatisés par cet acte, ou le redoutent au plus haut point ! On ne peut donc qu’être touché par cet article.

Point de vue du véto…

Si les propriétaires appréhendent le moment de faire partir leur compagnon, il faut savoir que c’est aussi souvent le cas des jeunes (ou moins jeunes) vétérinaires.

En effet, on veut que tout se passe au mieux, pour le confort de l’animal et afin de limiter le traumatisme subit par les propriétaires.

Alors on veut faire bonne figure (entendre : ne pas pleurer), que l’animal ne montre pas de douleur ou de stress malgré notre piqûre, et qu’il s’endorme sans réaction, sans spasme, sans vocalise.

C’est heureusement ce qui se passe la plupart du temps, même s’ils mettent parfois du temps à s’endormir, en fonction du niveau de fatigue de l’organisme et du niveau de stress…

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Mon expérience un peu plus personnelle…

Si comme beaucoup j’ai fait ce métier par vocation, j’ai choisi cette voie pour les animaux avant tout. Je voulais pouvoir les soigner et soulager leurs souffrances, même si cela impliquait de les aider à partir…

En sortant d’école, j’avais moi aussi peur que ça ne se passe pas aussi bien que je le voulais…

Mais à quelques rares exceptions près, j’ai toujours été soulagée de voir avec quelle douceur nous pouvions faire cesser leurs souffrances…

Si bien qu’au début, j’étais même choquée de ne pas être plus affectée, à chaque vie que je prenais… Je ne ressentais pas de tristesse, hors mis celle que je pouvais avoir pour les propriétaires éplorés. Et encore… J’avais surtout un sentiment de paix une fois la souffrance envolée. Je me sentais à ma place, dans ce que je devais faire pour eux. Et au fil des années, le stress que ça se passe mal a presque disparu. J’en suis même arrivée à apprécier être là pour les gens. J’ai commencé à savoir trouver les mots qui aident un peu dans ce moment terrible (enfin, je crois…). Je suis toujours extrêmement touchée par la sincérité du remerciement qui m’arrive lorsque je quitte les propriétaires.

Et c’est d’autant plus vrai depuis que je travaille à domicile.

Dans ce contexte, les propriétaires sont presque toujours présents lorsque j’endors leur animal. Le stress de ces loulous est souvent au plus bas, pour ma plus grande satisfaction. Et je mets un point d’honneur à essayer de conserver cela jusqu’au bout.

Par exemple pour les grands chiens, je pose souvent mon cathéter sur une patte arrière, même si c’est souvent plus compliqué qu’à l’antérieur… Le propriétaire peut ainsi rester près de la tête de son animal pour le rassurer, ils sont « juste entre eux », je suis presque invisible pendant que je fais malgré tout mon travail… Et si l’animal est trop sensible ou stressé par ces manipulations, je l’endors avant de poser mon cathéter, par une simple piqûre dans la fesse…

Alors pourquoi je n’aime pas cet article?

Ce que ces quelques années de pratique et d’ouverture aux gens m’ont appris, c’est surtout que chacun traverse ce moment comme il le peut…

Ainsi traiter de lâches les propriétaires qui ne peuvent pas assister à cet acte comme le fait cet article m’indigne ! Voire son animal s’endormir et rester là, gisant, les yeux ouverts, la respiration parfois faible, n’est pas forcément donné à tout le monde. Qui sommes-nous pour juger ? Je ne me le permettrais jamais en tout cas.

 

Bien sûr, lorsque le maître part, certains animaux s’inquiètent. Mais j’en ai aussi vu beaucoup qui n’avaient plus la force pour ça… Et certains sont aussi inquiétés de voir leur propriétaire s’effondrer à leurs côtés dans ce moment si difficile… Faire une généralité de ces cas où le chien cherche son maître est intellectuellement malhonnête. Cela fait peser une culpabilité tellement lourde sur le propriétaire qui gère ses émotions comme il le peut… C’est tout sauf respectueux…

Conclusion :

Alors voici mon conseil :

Lorsque vous aurez à traverser cette épreuve, faites ce que vous pouvez, sans culpabiliser…

 

Vous faites le maximum dont vous êtes capable, je le sais. Et même si cela implique d’exprimer de la colère, ou de sortir de la salle pour cacher votre émotion (hein messieurs ?), c’est votre droit le plus strict, et personne ne devrait vous juger pour cela…

 

Enfin, je vous souhaite de n’avoir à vivre cela que le plus tard possible… D’ici-là, profitons de chaque journée comme un cadeau, entourés et aimés de ces êtres si généreux, sans penser à demain comme ils le font si bien !

 

 

PS : je tiens à préciser que cet article n’est sponsorisé par aucune marque connue de mouchoirs… Pardon pour l’émotion, mais je voulais quand-même vous dire tout ça… Promis mon prochain article sera plus léger !

 

 

 

À très vite !